Je n'étais pas souvent seule en présence de Lupin, on ne savait pas trop quoi se dire. Mais cela allait sûrement changer cette année en raison de nos rôles de préfet. Au fond, il le méritait ce poste et j'avoue avoir été soulagée de cette motivation, nombre de Gryffondor manquaient cruellement de sérieux.
Lui, il était intelligent et responsable d'après ce que je pouvais en voir. C'était tellement bête qu'il traîne avec des abrutis comme Potter et Black, c'est ce qui m'avait toujours rendue plutôt réticente à son égard. C'était plus fort que moi mais Potter m'avait tellement harcelé par le passé-et présent également, malheureusement- que je rebutais devant tout ce qui pouvait avoir un quelconque rapport avec sa détestable personne.
Lupin et moi, on échangeait parfois en classe, mais sans plus. Et voilà qu’on allait se retrouver ensemble la moitié des soirs de semaines entre les rondes et « tâches de préfèts ».

Je restais songeuse, le regard fixé sur un point invisible. Le jeune homme perturba mes pensées solitaire soulignant à quel point j’étais matinale. J’esquissais un sourire devant l’ironie de cette remarque.

- Je pourrais te retourner la question. Enfin, il n’est pas si tôt... huit heures passées tout au plus... en semaine, tout le château serait levé depuis longtemps.
Pour tout t’avouer, je ne fais pas souvent la grasse matinée... Je pars du principe qu’il faut profiter au maximum de la journée et ce, même la samedi.
Ce n’est apparemment pas l’avis de tous les élèves, ajoutais-je avec un léger signe de tête vers la porte dont il était sorti, menant droit au dortoir des garçons.

Son visage exprimait une certaine douceur dont il n’avait certainement pas conscience, invitant aisément à la confidence. Mon regard s’attarda un instant sur son insigne de préfet et je me demandais si cette dernière avait autant de valeur pour lui que pour moi.

Qu’avait-il pensé en la recevant ? S’était-il senti fier ? Flatté ? Et comment avaient réagi ses amis ? L’avaient-ils félicités comme l’avait fait les miens ou s’étaient-ils moqués de lui ?
Et voilà que j’en revenais à eux !

Ce n’étais pas vraiment que je les admirais ou que je les méprisais -non ce traitement était réservé à Potter seul- mais je m’interrogeais beaucoup, comme tout le monde d’ailleurs, à leur sujet. On pouvait indéniablement voir qu’un certain lien les unissaient mais on ne pouvait clairement définir ce dernier.

- Et toi ? Tu te lèves tôt par habitude ou bien suite à une nuit agité ? Ce n’est pas tellement courant de rencontrer des gens dans la salle commune à cette heure... non que ta présence me dérange, bien au contraire.
C’est assez étrange...à croire qu’il n’y ai que les préfèts qui aient un semblant de discipline dans cette maison !

Si il avait pour habitude de se lever tôt. Comment cela faisait-il que je ne l’avait jamais croisé le matin durant quatre ans ?

La salle commune était décidément bien calme. Remus ne parlait pas si fort que ses amis, n'étalait pas sans cesse ses connaissances ou exploits qui étaient, me semblait il aussi nombreux que ceux de ses amis. Je l'avais mis dans la même case que ses amis sans vraiment avoir cherché à passer du temps avec lui même s'il m'avait toujours intrigué. Ce poste me permettrais peut-être de pouvoir apprendre à mieux le connaître.

"Je suis content que tu sois préfète, Lily. Enfin, qu’on soit préfets ensembles. C’est agréable, au moins je sais que je peux compter sur toi. Parce qu'avec la Maison de bras cassés qu'on se trimballe, c'est pas gagné."

Je dus avoir du mal à cacher mon étonnement. Il devait certainement être l’un des seuls de notre maisons à apprécier ma nomination. On m’avait fait de nombreuses remarques et souvent traitées de « rabat-joie » alors que j’interrompais des fêtes occasionnelles qui n’avaient pas lieu d’être. En réalité, j’avais conscience que certaines de mes réactions étaient peut-être un peu trop excessives mais je pensais qu’il était de mon devoir de faire régner un certain calme dans la salle commune afin que ceux qui désirent travailler le peuvent.
Avec un petit clin d'oeil complice, il ajouta :

"Et sache que si tu as des ennuis, tu peux m’en parler, je t’aiderai de mon mieux. Même s’il s’agit de recadrer James…"

Je levais les yeux au ciel. Ah oui parlons-en de celui là ! Il ne pouvait pas me laisser tranquille deux secondes dès que nous étions dans la même pièce. Il était irritant et en deviendrais presque lassant s'il ne variait pas ses méthodes pour revenir à la charge. Je savais qu'il était sorti avec plus de la moitié des filles du château, n'avait-il rien trouvé de mieux à faire que de me choisir moi pour l'une de ses conquêtes ?! J'en avais assez qu'il me considère comme l'une de ces dindes qui lui courraient après. Ce que je ne m'expliquait pas, c'est qu'il ne lâche pas l'affaire depuis le temps...
Peut-être que c'était le moment pour moi d'en apprendre plus.

- Mouai...en parlant de Potter. C'est quoi son problème ?! Pourquoi est-ce qu'il continue à me pourrir la vie ?! Il a pas compris qu'il ne m’intéressait pas .... enfin si c'est ça et non l'un de ces stupides paris dont il s'amuse avec Black...

Je les avais déjà surpris à se fixer pour objectif de sortir tant de temps avec une fille ou en moins d'une semaine mettre le grappin sur celle-là.... C'était si infantile !
Voilà pourquoi il ne se bornait qu'à des refus de ma part. Je n'étais pas tombé de la dernière pluie ! Comment un gars comme Potter pouvait-il seulement poser le regard sur une miss-je-sais-tout comme moi ? Il m'avait déjà assez dit à quel point j'étais coincé et que je ne savait pas m'amuser...
Me tournant vers Remus, je lui demandais :

- ce ne serait pas possible que tu lui dise de me fiche la paix à ton copain ?

Zut. J'avais peut-être touché un point sensible...en même temps, je crois qu'il fallait que nous en passions par là Lily et moi. Si elle me considérait plus ou moins comme un fauteur de trouble, c'était à cause de ma relation avec James, Sirius et Peter. Donc pour avoir sa confiance il fallait que je lui prouve ma valeur. Je ne valait pas mieux que mes amis. Je leur étais même bien inférieur....mais j'étais complétement différent d'eux. Complétement....
Je souris en entendant les paroles acerbes de la préfète. Oui, elle ne le portait pas dans son cœur mon Jamesie. En même temps, il lui en faisait voir des vertes et des pas mures.

"Oh, tu sais, il n'a pas vraiment de problème. Enfin, il est un peu spécial mais...je crois qu'il t'aime bien, vraiment. Ce n'est pas un pari. Il est juste...un peu maladroit."

Le regard septique de la jolie rousse me força à développer.

"Vraiment maladroit?..."

Elle était un peu dure avec lui. Il était fou d'elle. A longueur de journée c'était "Lily par-ci, Lily par-là", "ma préfète en sucre"....il était même insupportable certains jours. Mais je pouvais comprendre ses craintes. Les maraudeurs n'étaient pas connus pour leur droiture et leur maturité. Mes amis faisaient parfois preuves d'une gaminerie effarante. Je me laissais souvent prendre au jeu, mais quand il s'agissait des sentiments d'une enfant innocente, même moi j'avais du mal à rester neutre. Je cédais à leurs caprices, comme à ceux d'enfants gâtés. Parfois...non souvent....je réparais leurs bêtises en consolant ces pauvres filles malmenée ou en cachant les dégâts matériels avec toutes sortes de sortilèges.
Lily se tourna finalement vers moi et me demanda très sérieusement de calmer les ardeurs de James. Impossible évidemment, comme s'il allait m'écouter. Ce n'était même pas la peine que j'essaie. Mais je pouvais toujours traficoter la vérité...

"Je vais lui en toucher de mots. Bien sûr, je ne garantis rien."

Quoi? Ne me regardez pas comme ça. J'étais aussi un Maraudeur hein! N'allait pas croire que j'étais toujours honnête et bon. J'ai dit que j'étais le plus sérieux, pas que j'étais un modèle de vertu. Et puis...elle avait le temps de changer d'avis...

"Oh, tu sais, il n'a pas vraiment de problème. Enfin, il est un peu spécial mais...je crois qu'il t'aime bien, vraiment. Ce n'est pas un pari. Il est juste...un peu maladroit."

Je ne savais qu'en penser. D'un côté je restais amusée qu'il continue à le défendre au nom de son amitié mais le simple fait que ce soit Potter m’horripilais. Remus avait l'air sincère...mais repassant les diverses approches de son ami, je ne pus m'empêcher de conserver des doutes qu'en au pari. C'était son ami, il lui resterait fidèle en toute occasion de toute façon. Je regardais ailleurs, absente tandis qu'il tentait de lui trouver de quelconque excuses.

"Vraiment maladroit?..." ajouta le préfet devant mon regard noir.

- Et encore ! Même un niffleur dans une bijouterie s'en sortirait avec moins de pot cassé que lui.

Je n'étais pas spécialement dure...si ? C'était de sa faute pas de la mienne ! Potter parvenait toujours au pire et ce en toute occasion. Je n'y pouvais rien, moi ! Et cette manie stupide de passer sa main dans les cheveux pour donner l'impression qu'ils avaient été décoiffés par le vent. C'était d'un puéril ! Et sa façon de m'aborder au moins trois fois par jour pour me demander "Dis Evans, tu veux sortir avec moi ? " . Évidemment que c'était non et toujours non ! Et le pire était qu'il s'en étonne encore...
Je me calmais peu à peu pour éviter de crier sur Remus. Cela n'était en rien sa faute si son ami était si....enfin trop... était Potter quoi ! D'ailleurs, il semblait plus agréable, plus serein, lui et je n'eus pas grand mal à le croire dès qu'il me promit d'essayer d'en toucher deux mots au Maraudeur. Avec un peu de chance, le nombre d'avances par jour diminuerait. Je le remerciais chaleureusement avant de lui poser une question qui me trottait dans la tête, depuis un bon moment :

Dis, Remus qu'est-ce que ça t'a fait de recevoir ton insigne de préfet ?

J'avoue que j'eus un peu honte en souriant à Lily qui me remercie sincèrement de ma prétendue futur intervention auprès de mon ami James. Mentir, c'est mal. Ne le faites pas les enfants.
Je souris discrètement en entendant la jeune femme placer dans son estime un nifleur au dessus de Jamesie. Le pauvre, c'était vraiment méchant! Mais drôle, il faut bien l'avouer. La comparaison était percutante et fort bien trouvée. Ca n'aurait pas été loyal envers le Maraudeur qui devait avoir les oreilles sifflantes dans son lit. Et puis ça aurait pu nuire à mon image de grand calme toujours très soft dans ses réactions. Non, je blague, ce n'était pas un style que je me donnais. J'étais vraiment le genre de type qui sourit quand tout le monde éclate de rire et qui ne pleure jamais. Disons...mesuré dans mes réactions. Je sais que ça agaçait certaines personnes, mais que voulez-vous, on ne se refait pas.
Tout à mes réflexions sur l'avancement de la relation Lily/James, c'est la voix de la rousse qui me ramena sur terre.

Euh, joker? Mon insigne de préfet. Qu'est-ce que ça m'avait fait de la recevoir? Une décharge électrique. Un court-circuit. Sur le moment, je n'ai rien compris à ce qui m'arrivait. Dumbledore m'avait appelé dans son bureau tout naturellement et je pensais sincèrement qu'il allait me parler des dégâts que j'avais causés à l'orée de la forêt interdite la pleine lune précédente. Puis finalement, il avait avancé vers moi une insigne de préfet, m'avait souri et félicité. Au début, je pensais ne pas mériter ce poste. Je n'étais qu'un monstre après tout... Pourtant, ça me faisait chaud au cœur de savoir qu'on me faisait confiance. Cette insigne représentait les chaines qui allaient me forcer à rester dans un rôle pour le reste de ma scolarité. Mais elle était aussi le signe de mon appartenance à Poudlard. De mon appartenance à la race humaine.
Les yeux rivés au sol, je triturai un instant la petite insigne accrochée au pull de mon uniforme.

"Je...j'ai été surpris. Et heureux qu'on me fasse confiance. Même si, entre nous, le rôle de mère poule qu'on nous donne m'agace un peu."

Un peu beaucoup. C'était la porte ouverte à toutes les demandes. "Remus, s'il te plait, tu pourrais...", "Remus, quand est-ce qu'on...". Fatiguant...

"Et toi?"

Et voilà ! Chaque fois que la conversation déviait sur Potter on me voyait sous mon plus mauvais jour. C'était une bonne occasion de faire bonne mesure devant mon nouveau partenaire mais non...je partais et je devenais une vraie furie aux yeux de tous. Surtout que Remus le comptait dans ses plus proches amis ! J'aurais dû m'excuser, je le savais mais je préférais changer de sujet, assouvissant par la même occasion ma curiosité. Qu'est-ce que cela faisait à un garçon aussi gentil et timide que Remus de se retrouver avec de nombreuses responsabilités vis à vis des autres. Il était plutôt du genre à s'occuper de ses affaires que de celle de toute la tour des Griffons. Il en était heureux ce qui n'était pas trop mal ! S'il lui fallait coincer l'un de ses amis lors de leur virée nocturne, il ne devrait pas leur faire de cadeaux ! Et puis ce serait bien plus intéressant de travailler avec quelqu'un qui se préoccupait du travail bien fait.
Les rondes risquaient d'être longues et ennuyeuses tout au long de l'année...même si le poste de préfet était des plus convoités, il comportait également de nombreuses taches rébarbatives. Remus semblait des plus silencieux, peut-être que ces soirées se révéleraient d'un ennui encore pire que celles où je suis coincé avec ma soeur à la maison ! Je secouais la tête, décidant de ne pas partir du mauvais pied, c'était ridicule !
Avec un sourire, je répondis à Remus sur l'importance du poste à mes yeux :

- Cela va peut-être te sembler ridicule mais, depuis que je suis entrée à Poudlard, je ... je m'interrompis un instant, gênée. Peut-être qu'il répéterait tout cela à ses amis ? Et c'était la dernière chose que je voulais ! Que Potter en sache plus pour moi. Mais quelque chose de sincère dans son regard me poussa à continuer.
...je rêve de devenir préfète. Je sais que cette tache peuvent être agaçante ou ennuyeuse mais c'était comme une étape que je m'étais fixée. Alors recevoir mon insigne ! C'était vraiment génial !

Mes parents m'avaient bien entendu félicités, ravis de ma réussite...mais Tunie n'avait cessé de me rabrouer davantage cet été. Elle, elle avait échoué. Elle n'a pas pu obtenir sa bourse pour une prestigieuse école et elle ne pouvait supporter que moi, je la surpasse encore quelque part. Que même dans mon école de monstre, je puisse avoir de bonnes notes et un grade supérieur.
Je détournais un instant mon regard du jeune homme, craignant qu'il ne lise une tristesse dans mes prunelles que je ne voulais afficher. Mes problèmes demeuraient à Londres lorsque je prenais le Poudlard Express. Mais les démons moldus traversaient parfois la barrière pour me suivre jusqu'ici...
Un son mat attira soudain mon attention en direction de la fenêtre. Je levais la tête, échangeait un bref regard avec mon collègue avant de me précipiter pour ouvrir le carreau. Une chouette hulotte s'engouffra dans la pièce et je reconnus au blason ornant sa patte un animal de l'école. Qu'est-ce que cela pouvait-il signifier ?
Je m'approchais du volatile qui s'était posé sur une chaise et détachais le rouleau de parchemin de sa patte. A peine cela fut fait, qu'elle s'envola aussitôt par la fenêtre, sans demander son reste.

- Remus. C'est pour nous. Pour tous les deux.
Comment ça se fait que l'école prenne la peine de nous délivrer un hibou à cette heure-ci au lieu d'attendre le petit déjeuner et le courrier habituel ?

Ce pli devait être assez important pour que personne d'autre n'eut à le lire...mais comment cela se faisait-il qu'ils n'en aient envoyé qu'un pour nous deux ? Comment pouvaient-ils prévoir que nous serions levé et ensemble dans la salle commune ?
Interdite, je tendis le morceau de parchemin à Remus.

- Vas-y, ouvre-le.

C'était puéril mais j'avais comme un mauvais pressentiment. Tous ces mystères ou faits inhabituels à l'école... cela devait annoncer de mauvaises nouvelles.